Soutien à Antoine D!

Suite à l’incarcération de notre camarade Antoine D (le prénom a été modifié), trésorier des JC du Rhône…

COMMUNIQUÉ DE L’OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS (OIP) :

4 ans après sa condamnation à du sursis, un étudiant de Lyon 2 incarcéré en cours d’année scolaire. Le parquet de Saint-Étienne choisit l’incarcération d’un condamné libre, au détriment de sa réinsertion.

Le 5 mars der­nier, Antoine D.* a été incar­céré sur déci­sion du par­quet de Saint-Étienne dans le cadre de l’exé­cu­tion d’une peine amé­na­gea­ble. Le Procureur allè­gue d’une obli­ga­tion régle­men­taire alors que les textes lui per­met­taient de ne pas pro­cé­der à une incar­cé­ra­tion socia­le­ment nocive.

En 2008, alors qu’il était mineur, Antoine D. avait été condamné par le tri­bu­nal pour enfants de Saint-Étienne à une peine de 4 ans de prison, assor­tie d’un sursis avec mise à l’épreuve, com­por­tant les obli­ga­tions de suivre une sco­la­rité et d’indem­ni­ser les vic­ti­mes de ses délits. Aujourd’hui, Antoine est âgé de 22 ans. Il est titu­laire d’un bac­ca­lau­réat lit­té­raire et vit avec sa com­pa­gne depuis plus d’un an. Il a occupé plu­sieurs mois le poste de récep­tion­niste dans un hôtel lyon­nais, notam­ment pour finan­cer ses études. Depuis sep­tem­bre der­nier, il est ins­crit en pre­mière année de droit à l’Université Lyon II, où il suit les cours avec « assi­duité » selon une attes­ta­tion de plu­sieurs ensei­gnants. Il vient de passer ses exa­mens de mi-semes­tre. Il s’inves­tit dans la vie asso­cia­tive de la faculté et avait pré­senté, pour l’année en cours, sa can­di­da­ture pour siéger au conseil d’admi­nis­tra­tion de l’établissement. A côté de ses études, il occupe également le poste de tré­so­rier au sein d’une orga­ni­sa­tion poli­ti­que.

Le 5 mars 2012, Antoine était convo­qué à l’hôtel de police de Lyon pour une simple « noti­fi­ca­tion de juge­ment ». Arrivé sur place, il était « retenu » puis conduit à la prison de Lyon quel­ques heures plus tard pour y être écroué. Cette incar­cé­ra­tion a été déci­dée par le par­quet de Saint-Étienne, qui a fait le choix de mettre à exé­cu­tion en prison un arrêt de révo­ca­tion par­tielle du sursis avec mise à l’épreuve de l’inté­ressé. Cet arrêt avait été pro­noncé le 4 jan­vier 2012 par la cham­bre de l’appli­ca­tion des peines de la cour d’appel de Lyon, qui avait relevé « qu’en s’abs­te­nant (…) de faire connaî­tre sa nou­velle adresse » au juge de l’appli­ca­tion des peines pen­dant deux années, Antoine « a violé les obli­ga­tions dont il était débi­teur » dans le cadre de sa condam­na­tion ini­tiale. Cependant, pre­nant acte de la situa­tion per­son­nelle de l’inté­ressé à la date du juge­ment, la Cour limi­tait la révo­ca­tion « à un quan­tum amé­na­gea­ble de deux années » afin de « ne pas entra­ver sa réin­ser­tion ». Il appar­te­nait ensuite au par­quet de Saint-Étienne de mettre à exé­cu­tion cette déci­sion. Celui-ci n’a pas entendu l’appel du pied de la Cour pour que la peine soit direc­te­ment amé­na­gée, et pré­féré une incar­cé­ra­tion, fai­sant fi de la situa­tion indi­vi­duelle d’Antoine.

Pour jus­ti­fier l’oppor­tu­nité de la déci­sion de ses ser­vi­ces, le pro­cu­reur expli­quait à l’OIP, le 29 mars der­nier : « nous sommes obli­gés de mettre à exé­cu­tion » les mesu­res de révo­ca­tion de sursis car ces mesu­res « sont exé­cu­toi­res par pro­vi­sion », c’est à dire que « ça s’exé­cute tout de suite et ça déroge à toutes les autres règles » qui favo­ri­sent l’amé­na­ge­ment des peines d’empri­son­ne­ment infé­rieu­res ou égales à deux ans. Or, l’arti­cle D. 147-16-1 du code de pro­cé­dure pénale visé par le magis­trat permet pour­tant au par­quet de ne pas pro­cé­der à l’incar­cé­ra­tion « si la situa­tion par­ti­cu­lière du condamné le jus­ti­fie ».

Du fait de sa déten­tion, Antoine a dû inter­rom­pre ses études et l’ensem­ble de ses acti­vi­tés. Actuellement incar­céré à la maison d’arrêt de Villefranche-sur-Saône où il a été trans­féré, Antoine expli­que, dans un cour­rier à l’OIP :

« j’ai mis tellement de force et d’énergie à ma réinsertion, baccalauréat, études supérieures, travail afin de payer les frais d’études, que cette condamnation ne me prive pas seulement de liberté mais d’avenir et d’espoir ».

L’OIP rappelle :

– que la loi prévoit que « les peines sont aménagées avant leur mise à exécution (…) si la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ou leur évolution le permettent » (art. 707 du CPP) et que « les personnes non incarcérées, condamnées à une peine inférieure ou égale à deux ans de prison (…) bénéficient, dans la mesure du possible et si leur personnalité et leur situation le permettent » d’un aménagement de leur peine (art. 723-15 du CPP) ;

– que le Conseil constitutionnel a élevé au rang de principe constitutionnel l’individualisation des peines (décision n° 2010-6/7 QPC du 11 juin 2010) ;

– que le garde des Sceaux a récemment demandé aux magistrats du parquet « de favoriser le prononcé de mesures d’aménagement de peine lorsque la personnalité et la situation des condamnés le permettent » (circulaire du 8 mars 2012 relative aux instructions générales de politique pénale, voir également les circulaires du 12 mai 2011 et du 29 septembre 2009).

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